Le paysage de la lutte contre la fraude évolue rapidement en France, porté par de nouvelles mesures ambitieuses. Un projet de loi inédit s’apprête à bouleverser les règles du jeu pour les détenteurs de contrats d’assurance-vie et les fraudeurs potentiels.
Entre contrôle renforcé, accès élargi aux données patrimoniales et sanctions durcies, l’État entend combler les failles du système et protéger les finances publiques.
Les dispositifs annoncés promettent de transformer durablement la prévention, la détection et le recouvrement des fraudes, tout en imposant de nouvelles obligations aux particuliers comme aux professionnels.
Contexte et objectifs du projet de loi contre les fraudes sociales et fiscales
Face à l’ampleur des fraudes sociales et fiscales, estimées à 20 milliards d’euros détectés en 2024 dont 3 milliards dans le secteur social, le gouvernement français renforce sa riposte avec un nouveau projet de loi. Ce texte, présenté en octobre 2025, vise à doter l’État d’outils plus efficaces pour repérer, sanctionner et récupérer les sommes indûment perçues.
Parmi les mesures phares : l’accès élargi aux fichiers patrimoniaux, la possibilité de saisir la valeur de rachat des contrats d’assurance-vie et le décloisonnement des échanges d’informations entre administrations. L’objectif affiché est clair : adapter la lutte contre des fraudes de plus en plus sophistiquées et garantir la protection des finances publiques.
Renforcement des moyens de détection et d’investigation
Le projet de loi introduit un décloisonnement inédit des échanges d’informations entre administrations, facilitant la circulation des données fiscales, sociales et douanières. Les agents des caisses de Sécurité sociale bénéficieront désormais d’un accès direct au fichier Ficovie, recensant tous les contrats d’assurance-vie, comblant ainsi une faille majeure dans la détection des patrimoines dissimulés.
Le fichier Ficovie répertorie tous les contrats d’assurance-vie détenus en France. Son accès élargi aux agents de la Sécurité sociale change la donne :
- Les patrimoines dissimulés pourront désormais être repérés plus vite.
- Les contrôles croisés entre services (fisc, URSSAF, douanes) seront automatisés.
- Les délais d’enquête devraient être considérablement réduits.
Des dispositifs sectoriels sont également prévus : géolocalisation obligatoire pour les transports sanitaires, contrôles renforcés dans la santé et la formation professionnelle, et traque des fraudes dans le secteur VTC. Ces mesures, en croisant les sources d’information et en adaptant les outils aux nouvelles pratiques, visent à déjouer des schémas frauduleux de plus en plus complexes et à accélérer les investigations.
Durcissement des sanctions et responsabilisation des acteurs
Le projet de loi prévoit un alourdissement significatif des sanctions à l’encontre des fraudeurs, qu’ils soient particuliers ou professionnels. Les peines pour escroquerie en bande organisée contre les finances publiques pourront désormais atteindre 15 ans de prison, tandis que les sanctions financières sont renforcées, notamment via la saisie de contrats d’assurance-vie pour recouvrer les dettes sociales.
Les professionnels de santé s’exposent à des pénalités cumulatives et à la suspension de leur convention en cas de fraude, et les titulaires du CPF devront rembourser les sommes perçues s’ils ne se présentent pas aux examens. Enfin, les détenteurs de trusts non déclarés font face à des obligations déclaratives accrues et à des amendes majorées, illustrant la volonté de responsabiliser tous les acteurs.
Nouvelles procédures de recouvrement et saisie de l’assurance-vie
Parmi les innovations majeures, le projet de loi confère aux caisses de Sécurité sociale un pouvoir inédit : celui de saisir la valeur de rachat des contrats d’assurance-vie via la procédure d’opposition à tiers détenteur. Cette mesure permet de bloquer les fonds détenus par les assureurs afin de rembourser les sommes indûment perçues, empêchant ainsi que l’assurance-vie ne serve de refuge aux fraudeurs.
En facilitant l’accès aux données patrimoniales et en élargissant les moyens de recouvrement, l’État entend accélérer la récupération des créances sociales et renforcer l’efficacité de la lutte contre la fraude, tout en adaptant ses outils à la sophistication croissante des montages frauduleux.


